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28 octobre 2014 2 28 /10 /octobre /2014 09:59

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VINCENT LE COQ DANS CONTREPOINTS : « L'INTERPROFESSION, UNE NOUVELLE DYNAMIQUE »

https://www.contrepoints.org/2014/10/28/186163-notaires-linterprofession-une-nouvelle-dynamique

Un nouvel article corédigé par Vincent Le Coq et un jeune notaire sous pseudo, dans Contrepoints : »  

« Notaires : l’interprofession, une nouvelle dynamique  

Publié Par Vincent Le Coq, le 28 octobre 2014 dans Droit et justice, Société  

L’unique préoccupation qui doit guider aujourd’hui la réflexion est, non pas l’intérêt des différents professionnels arc-boutés sur la défense de leur statut, mais bien l’intérêt du justiciable.  

Par Vincent Le Coq et Félix Dubois.  

Nos fidèles contradicteurs, amis, et quelques autres nous reprochent de regarder par trop vers le passé, et pas assez vers l’avenir. Nous allons donc ici répondre à cette invite. La présente tribune est cosignée par un ancien avocat devenu enseignant et un jeune notaire qui pense préférable de le faire avec un pseudonyme.  

Et puisque nous avons décidé de faire quelque chose de fou, nous avons retenu, formellement, trois parties. Ça décoiffe un peu.  

Le constat  

En raison du nombre artificiellement limité des offices notariaux, il est manifeste qu’un décalage se creuse chaque jour entre une demande de droit croissante et une offre juridique constante.  

Parallèlement à une offre bloquée, la demande de droit ne cesse d’augmenter dans les sociétés modernes : « On assiste à une réelle augmentation des besoins de services juridiques personnels, liés notamment au vieillissement de la population, à la multiplication du nombre de divorces et plus largement à la diversification des formes d’organisation patrimoniales (…) Par ailleurs, les entreprises attendent des services notariés innovants conformes aux standards internationaux, notamment en matière immobilière » (Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française, 2008, La documentation français, XO éditions, p. 174).  

La lettre de mission à Maître Jean-Michel Darrois débute mêmement par un énoncé dénué d’ambiguïté de l’enjeu : « la création d’une grande profession du droit » (« réformer la profession d’avocat avec, comme objectif, la création d’une grande profession du droit »). Cet objectif est unanimement reconnu, par les juristes sérieux, comme un facteur de compétitivité du système juridique de la France. Dans la France contemporaine, les praticiens du droit sont en effet compartimentés en de multiples statuts qui sont autant d’obstacles à la circulation de l’information et à la naissance d’une culture commune. La situation contemporaine est celle d’une quasi-ignorance des professionnels les uns vis-à-vis des autres.  

L’objectif  

Il convient à l’évidence de dépasser les querelles de clocher et la volonté de préservation de prés carrés qui balisent par avance tout débat qui s’engage sur le sujet et le rendent stérile et vain. L’unique préoccupation qui doit guider aujourd’hui la réflexion est, non pas l’intérêt des différents professionnels arc-boutés sur la défense de leur statut, mais bien l’intérêt du justiciable.  

Il est désormais patent que nombre de projets dépassent, en raison de leur complexité, le périmètre des compétences couvert par un seul professionnel, qu’il soit notaire, avocat ou expert-comptable. Il est donc nécessaire d’engager sans délai une dynamique nouvelle en créant une synergie entre tous ces acteurs d’un développement économique tournés vers une activité productive de services et d’industries.  

L’objectif est de créer les conditions d’un meilleur service à apporter tant aux particuliers, s’agissant notamment de placements sophistiqués, faisant appel à des démembrements de propriété, qu’aux entreprises dès lors que sont envisagés des montages impliquant des groupes de sociétés.  

Les moyens  

Il convient, puisque les conditions psychologiques d’une grande profession ne sont pas réunies à ce jour, de créer les conditions d’une interprofessionnalité entre notaires, avocats et experts-comptables. Cette interprofessionnalité pourra demeurer ponctuelle, lorsqu’il s’agira de la participation de plusieurs professionnels du droit et du chiffre à un montage. Il conviendra ici d’imaginer un régime d’assurance global permettant de couvrir l’ensemble du risque lié à l’opération.  

Cette interprofessionnalité pourra s’inscrire dans la durée, et à cet effet être institutionnalisée. C’est très exactement la proposition exposée par Emmanuel Macron durant son audition devant la sous-commission parlementaire présidée par Cécile Untermaier. À l’évidence, il ne s’agit aucunement d’une financiarisation des professions considérées puisque les structures seraient exclusivement la propriété des professionnels concernés. Dans ces deux situations, il s’agit de rapprocher des structures existantes, sur le plan contractuel ou en retenant un mode institutionnel.  

Mais il faut encore songer à l’installation des nombreux DSN, aujourd’hui bloqués dans leur progression normale par le malthusianisme de leurs aînés. Les chiffres sont aussi parlants que les faits têtus. Emmanuel Macron les a exposés dans leur froideur. « 85% des notaires associés gagnant plus de 17 000 euros sont des hommes. Dans le même temps, 84% des notaires salariés rémunérés moins de 4 000 euros sont des femmes. »  

Une société qui sacrifie ses jeunes et ses femmes au profit des seniors est manifestement une société qui se porte mal. C’est précisément la raison pour laquelle la commission Darrois avait porté une attention particulière sur les aspirants notaires « considérant qu’il s’agissait d’un vivier intéressant pour insuffler à la profession un nouveau dynamisme » (rapport sur les professions du droit, pdf, mars 2009, p. 51).  

La Commission Darrois avait fait une proposition intéressante : permettre à un jeune, ou un moins jeune DSN de s’installer, dans le cadre d’une société interprofessionnelle dès lors qu’un cabinet d’avocat en formerait le souhait. En adoptant ces trois solutions, première phase d’une grande profession de services articulant les professionnels du droit et ceux du chiffre, la France se donnerait les moyens de sortir de ses archaïsmes.  

Ce sera pleinement le cas lorsque le jeune notaire cosignataire de cette tribune pourra le faire sous son nom."


Rappelons que le schéma des "avocats-notaires" existe déjà dans tous les pays "évolués", tandis qu'en France on en est encore au stade d'un interminable débat politique autour de l'archaïsme que constitue la frontière entre avocats et notaires.

C'est l'une des raisons pour lesquelles le pays s'enfonce, inexorablement, dans une crise économique, financière, sociale, sans précédent depuis "la grande dépression" des années 1929 et suivantes.

Et tous les efforts du talentueux et courageux ministre de l'Economie Emmanuel Macron, soutenu par son Premier ministre Manuel Valls, se heurtent à une collection de parlementaires eux-mêmes très archaïques et, parfois, corrompus (voir, entre autres, l'article du Canard Enchaîné sur les parlementaires en situation de fraude fiscale, et le travail de Transparency et d'Anticor sur cette situation consternante).

Inévitablement, la question (qui fâche) du lien entre l'actuel et archaïque statut des notaires et la corruption, sous toutes ses formes, qui touche une fraction de notre personnel politique, doit être posée.

La possibilité pour les avocats de prendre une participation dans les SCP de notaires, ou d'intégrer des diplômés notaires dans leurs sociétés d'avocats avec la possibilité pour ceux-ci d'établir des actes "authentiques", constituerait déjà une avancée significative. 


 

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